Nous vous proposons la lecture d’un article d’Arlette Zylberg, paru le 1er février 2014 dans « NOVO IDEO », le think tank des politiques publiques :
« IVG : vent d’Espagne
Le 5 avril 1971, le Nouvel Obs publiait le « Manifeste des 343 » femmes déclarant qu’elles avaient avorté. Parmi elles, Simone de Beauvoir, Delphine Seyrig, et d’autres, moins connues.
Ce Manifeste, commençait ainsi : « Un million de femmes se font avorter chaque année en France ».
Quatre ans plus tard, la loi Veil légalisant l’Interruption Volontaire de Grossesse, IVG, était votée par un tiers des députés de droite, et la quasi unanimité des députés de gauche. Le mouvement des femmes avait enfin gagné l’accès à la contraception et à l’avortement et fait reculer la mainmise de l’Etat et des hommes sur la fécondité et la sexualité des femmes.
Pour autant, si le recours à l’avortement est légal et entré dans les mœurs, sa légitimité est régulièrement remise en cause par la frange la plus conservatrice de notre société.
Où en sommes-nous de l’IVG en France ?
Le délai légal est 12 semaines pour pouvoir accéder à l’avortement. Les frais de soins, liés à une IVG, sont intégralement remboursés depuis le 1er avril dernier. Le nombre d’avortements est stable depuis 30 ans : autour de 210 000 avortements par an, et l’on estime à 35% le nombre de femmes qui avorteront une fois dans leur vie. Sachant qu’une femme est « fertile » environ 35 ans dans sa vie et qu’une contraception est rarement sûre à 100%, ce chiffre devrait rester stable.
LE STRESS ET LA DETRESSE
La semaine passée, les député-es ont adopté un amendement qui a remplacé l’idée de « situation de détresse » d’une femme pour pouvoir recourir à une IVG, par « la femme qui ne souhaite pas poursuivre une grossesse ». Les détracteurs du droit à l’avortement, surfant sur les manifestations contre le mariage pour tous ont repris leur cheval de bataille, allant même jusqu’à proposer le déremboursement de l’IVG.
L’avortement, une question d’égalité
Le siècle dernier a vu une mutation de la société avec l’émergence et la visibilité des femmes dans la sphère publique et politique. Pouvoir s’affranchir de leur fonction de reproductrice a permis aux femmes de s’autonomiser. Ce qui est contraire à la vision patriarcale de la famille qui assigne les personnes à des rôles hiérarchisés en fonction de leur sexe, à la domination du masculin sur le féminin. Or si en France, nous nous sentons à l’abri d’un retour en arrière, la volonté du gouvernement espagnol d’interdire l’avortement a réveillé les peurs des femmes.
Le droit à la contraception et à l’avortement en échec au Parlement européen
Le 10 décembre 2013, le Parlement Européen a rejeté le « rapport sur la santé et les droits sexuels et génésiques » dit « rapport Estrella », porté par la présidente de la Commission pour les droits de la femme et l’égalité des genres. Ce rapport demandait, entre autre, un accès généralisé à la contraception, et à des services d’avortements sûrs.
Ce rejet, dû à une coalition des droites européennes et des lobbies intégristes catholiques et protestants, additionné à la situation en Espagne a secoué les femmes en Europe.
A l’appel des féministes européennes, la mobilisation s’est organisée. Ce samedi 1er février, journée de mobilisation en Espagne, des manifestations ont lieu partout en Europe, pour que le droit à la contraception et à l’avortement soit inscrit dans la Charte européenne des droits fondamentaux. »
Arlette Zilberg, orthophoniste, militante écologiste et féministe, a été adjointe au maire EELV du 20e arrondissement de Paris, en charge des questions liées à la petite enfance.
Proposition :