Le 16 octobre 2012, se tenait à Paris 19e, une conférence organisée par l’Union Nationale des Entreprises du Paysage (réservée aux professionnels) qui a mis en évidence le rôle central du végétal pour construire la cohésion sociale.
Toitures, murs, voies urbaines et parkings végétalisés, jardins particuliers, partagés ou éphémères, potagers urbains… les Français aiment le vert et en réclament. Le remettre au cœur de l'urbain est devenu unanimement un enjeu de « cohésion sociale », selon des professionnels du secteur.
Le parc du 8 mai 1945, menacé par un projet immobilier (photo du haut l'espace vert de la cité OPHLM Girardot "sacrifié" pour construire deux immeubles) supplémentaire
Selon IPSOS, plus de neuf Français sur dix estiment que le contact avec le végétal est important, voire essentiel à leur quotidien, sept Français sur dix qu'il n'y a pas assez de végétal en ville, un sur deux que le jardin est l'une des deux « pièces » les plus importantes de sa maison.
L'espace vert des faux murs à pêches, rues Raymond Lefebvre et Babeuf, détruit pour construire des immeubles supplémentaires pour l'OPH
Et l'enjeu est de taille aussi pour l'ensemble de la « filière végétale » tant « il est plus facile de couler du béton ou d'installer un dallage que de verdir un centre-ville », souligne Emmanuel Mony, président de l'Union nationale des entreprises du paysage (Unep) qui organisait une table-ronde sur le sujet.
Le végétal n’est pas seulement décoratif
« On ne peut plus considérer le végétal comme décoratif et secondaire. Il est devenu essentiel à la qualité de vie et au vivre ensemble, comme une infrastructure, à un moment où la sphère privée se rétrécit », résume Jean-Marc Bouillon, président de la Fédération française du paysage.
À ses côtés, des directeurs des espaces verts, paysagistes, jardiniers, entrepreneurs, sociologues, urbanistes et chercheurs.
Le parking 12 rue P. et M. Curie (bien utile par ailleurs) très arboré, condamné par l'opération immobilière programmée
Signe parmi d'autres de ce besoin d'espaces verts, « la hausse de fréquentation continue des parcs, multimillionnaires » en nombre de visiteurs et dont les parterres alternent de plus en plus avec des aires sauvages ou dédiées aux pique-niques, ainsi que l'engouement pour les jardins partagés, qui attirent « des femmes à 50 % et surtout des moins de 30 ans », selon Jacques Soignon, directeur du service espaces verts et environnement de Nantes.
À Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), les jardins éphémères humoristiques installés chaque année pendant cinq mois dans la vieille ville, depuis six ans, rencontrent un succès énorme, explique Louis Djalai, directeur des espaces verts de la ville. Tout comme à Nantes, ville pionnière, les jardins flottants et nombreuses opérations à thème vouées aux jardins.
Au 115 rue Robespierre
Développer la biodiversité en ville
D'un bout à l'autre du territoire, il est donc « urgent de penser la ville autrement, pour protéger la biodiversité au sein des jardins, en trouvant des compromis et donc des solutions techniques », estime Thierry Mueller, architecte paysager strasbourgeois à la tête d'une PME spécialisée dans les techniques innovantes liées aux sols.
L'engouement pour une mini-ferme pédagogique : la visite du 115 Robespierre à l'automne 2006
Pas facile pourtant, quand l'espace disponible est réduit et quand les sols sont pollués. Car dans les villes, souligne-t-il, « le sol n'est pas fertile. Verdir des espaces réduits et linéaires, des friches, lignes de tramways, pistes cyclables, alentours de centres commerciaux en tenant compte des réseaux électriques ou de gaz souterrains, de la gestion des eaux de ruissellement » n'est pas une mince affaire.
Toujours le 115
« Les bienfaits du végétal, dont la simple présence réduit le niveau d'anxiété, sont prouvés depuis longtemps », explique Sandrine Manusset, docteur en sciences de l'environnement. « Il humanise les lieux, réduit la pollution, favorise les échanges, le bien-être individuel et collectif.
L’animal en ville
Il n’est pas inutile d’ajouter que l’animal en ville va de pair avec la place du végétal et contribue encore plus largement peut-être à humaniser la ville et ses habitants blessés, amputés, par leur univers de béton.
Un mini-poulailler
À ce titre, la réalisation des mini-mares (avec leurs grenouilles et leurs crapauds, leurs insectes), des mini-poulaillers et bien évidemment la création d’une mini-bergerie (à Bagnolet) sont des initiatives qui adoucissent la dureté du béton et créent du lien entre les habitants en leur permettant d’accéder au sensuel. D’où l’engouement suscité il y a quelques années par notre projet de mini-ferme pédagogique au 115 rue Robespierre (projet bloqué à l’époque, mais qui pourrait ressurgir). Les végétaux et les animaux sont les vrais médiateurs urbains.
La mini-mare du jardin guinguette de la Dhuys
Préserver l’espace, combattre la bétonisation
À Bagnolet, les citoyens doivent défendre « bec et ongles » chaque m² de sol naturel. Ils doivent semer partout, dans chaque interstice, au pied de chaque arbre.
Ils doivent surtout s’opposer avec la dernière vigueur à la bétonisation de la ville, à sa surdensification pour pouvoir conserver ces respirations vertes indispensables à … la vie et au bonheur de vivre-ensemble.
Hélène Zanier
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