Pour information voici un petit article de Mélanie Delattre et Christophe Labbé .dans Lepoint.fr qui date un peu (mais nous le découvrons ces jours-ci) du 9 décembre 2015 :
« La petite cuisine des frères Bartolone
À Noisy-le-Grand, celui qui brigue la région Ile-de-France a fait une excellente affaire avec son frère Renato au temps où il dirigeait le département.
« Les gastronomes du 6e arrondissement de Paris connaissent bien le Marco Polo, rue de Condé. Prisé des amateurs de cuisine italienne, ce restaurant a désormais son annexe à... Noisy. » En octobre 2011, c'est sur une pleine page que le magazine de la commune de Seine-Saint-Denis célèbre l'ouverture d'une trattoria chic en centre-ville. Et la revue du maire de s'enthousiasmer pour le caractère bucolique des lieux : « La cour intérieure est bordée par un jardinet où poussent des lavandes, un olivier et des cyprès. En salle, des portes en bois anciennes ont été détournées en d'élégants miroirs... » Côté fourneaux, même coup de coeur de Noisy Magazine: «Le directeur, Fabio Gambardella, originaire de Calabre, s’est entouré de chefs de rang toscans et d’un pizzaiolo napolitain. En cuisine, le chef vient des Pouilles et sa seconde est sicilienne. Tout ce petit monde s’apostrophe gentiment en italien et vous concocte une cuisine goûteuse.»
Ne manque dans cet article dithyrambique que le nom du propriétaire. En l’occurrence Renato Bartolone, frère de l’actuel président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, en lice pour la région Ile-de-France.
Si le restaurateur, récemment décoré de l’ordre du Mérite, ne rate pas une occasion de mettre en avant son établissement phare du 6ème arrondissement, celui où il régale depuis trente ans les ténors politiques, notamment socialistes, il se fait discret sur son adresse de Noisy-le-Grand. Peut-être pour ne pas gêner son aîné, qui, jusqu’à son arrivée au perchoir en 2012, dirigeait la Seine-Saint-Denis. La seule mention publique de cette acquisition figure dans une délibération du conseil municipal de Noisy datée du 20 juin 2008. On y lit, à propos de la cession d’un bâtiment communal situé au 194, avenue Pierre-Brossolette: «M. Renato Bartolone a proposé à la ville d’acquérir cette propriété afin d’implanter un restaurant italien gastronomique.»
La maison de 230 m 2 a été achetée par l’intermédiaire d’une société civile immobilière pour 345000 euros, soit 1 500 euros le mètre carré. D’après les statistiques du site Meilleursagents.com, seize biens ont été vendus avenue Pierre-Brossolette au cours des six dernières années au prix moyen de … 4 000 euros le mètre carré !
Pour le maire PS de l’époque, Michel Pajon, la municipalité n’a pas fait de prix d’ami à M. Bartolone: « Le bâtiment était en très mauvais état, nous avons repris l’évaluation faite par France Domaine.»
Ce que l’édile ne dit pas, c’est qu’une placette piétonne attenante au bâtiment a été créée de toutes pièces. Après un premier aménagement réalisé en 2008 par les services municipaux, la mairie a remis la main à la poche pour 478 000 euros.
Le lieu est désormais décoré d’une grande fresque murale et agrémenté d’une fontaine, l’achat de poissons ayant à lui seul coûté 2 000 euros. La rue a été entièrement rénovée, avec un nouveau mobilier et un pavement de granit. Tous ces travaux financés par la municipalité ont fait grimper la valeur du 194, avenue Pierre-Brossolette, pour le plus grand bonheur de la famille Bartolone …
SCI La Strada. En épluchant les statuts de la SCI La Strada, qui a permis d’acheter les murs, Le Point a découvert que Claude Bartolone et son épouse détiennent la moitié des parts au côté de Renato. A charge pour ce dernier d’exploiter le restaurant et de s’acquitter d’un loyer auprès de la société familiale. Contacté, Renato Bartolone n’a pas répondu à nos questions. Son frère, qui mentionne dans sa déclaration d’intérêt 50 000 euros de parts détenues dans une SCI, n’a pas souhaité nous préciser les conditions de son investissement, réalisé quatre mois seulement après qu’il a été intronisé président du conseil général de Seine-Saint-Denis. L’élu du 93 n’aime pas que l’on mette le nez dans ses arrière-cuisines.
Au moment du vote de la loi sur la transparence de la vie publique, il avait mené la fronde contre la publication du patrimoine des parlementaires. Juste avant, Le Canard enchaîné l’avait contraint à un premier geste de transparence en publiant la photo de sa villa d’architecte aux Lilas. Estimée 2 millions d’euros, cette demeure de 380 mètres carrés avec vue sur tout Paris a été dessinée par le cabinet RVA, dont l’un des patrons est un ex-collaborateur de Claude Bartolone au ministère de la Ville. Une agence incontournable en Seine-Saint-Denis, que l’on retrouve sur plusieurs grands projets urbains … à Noisy-Le-Grand. »